Progression

Trop peu de mots déboulent, séchant à la source
Tout est ardu je crois, quant à savoir pourquoi
Y a-t-il un mélange du fond de la bourse
Quand ma tête est ailleurs rien n’est tiré de moi.

Et ce sac étant vide, si peu est produit
Rendu tant dépressif c’est assez retenu
Que je change la teinte du style qui fuit
Couleur qui vire au vert; progression si menue.

D’une addition soudaine, élément perturbé
C’est la boucle sans fin que ne pourra sortir
De ça de bonnes choses qu’il a absorbées
La fatigue de nuit l’empêche de dormir.

Qu’est ce qui manquera à ce dieu sans pouvoir
D’un écrit inutile si vide de sens
Il pourra chercher à retrouver le savoir
Tel est l’homme idéal: avant de dire, il pense.

Pas d’odeur

D’un montant si banal qu’il est tant disparu
Supprimé par la bonne volonté du temps
Il se rend à la bourse du gars de la rue
Y a-t-il un finaud ayant flair si autant.

Au génie sans âge ni maturité
Celui qui de ses doigts le moment adéquat
Subtilise, subtil il est sans parité
Enrichir aux dépens de la plèbe sans voix.

Attention c’est danger de cette blanche neige
Mais le foin n’est pas autant banal que d’ailleurs
Facile de couper, qualité que n’aurais-je
Paradoxe à blanchir sans tuer le veilleur.

Et les pires sont ceux qui font ça au grand jour
Magouilles si visibles qu’elles sont ignorées
Protégés par des lois, l’interprète a le tour
L’argent n’a pas d’odeur car il pue le papier.

Franchise

Une vérité mauvaise à dire
Mensonge inverse
Que la première fait mal
Mais ne brise jamais.

Sans ménagement, jamais,
Les tristes ou horribles nouvelles
L’attente est torture
Tout comme la progression.

Un homme assommé ne souffre pas
Assommer, donc
Pour ne point torturer
Qu’il se croie dans un cauchemar.

Plus tard il se réveille et
La vie, infiniment
Est plus douce.

Comme un ion

Comme dans une eau solvante
D’un seul ensemble dissous
Multitude séparée mais unique
Comme un ion.

Soluté salutaire
Un ion comme
Mélange homogène
D’éléments hétéroclites.

Union commune à ceci
D’une grandeur indescriptible
Vue imprenable
Incompréhensible à notre état.

Un tout fait d’ion
Qui ne comprennent pas
Qui commencent à peine à voir
À quel point leur commune insaisissable.

Saturation impossible
Ensemble catalytique
Permet le courant
Comme un ion.

Mortici

Un insecte est mort ici
D’une overdose de vie
D’un délai expiré, fini
Du temps accompli.

Pattes en l’air
Ailes par terre
Plus un mouvement vers
De son vivant, la lumière.

Petit être qui inspire le dégoût
Cadavre qui n’a rien fait du tout
Que voleter de bout en bout
Et puis mourir près de nous.

Un insecte est mort ici
On porte plus attention, oui
À un petit caillou poli
Qui, jamais, n’a eu la vie.

Facile dans la nuit

Nul ne peut dire quand mais
Facile dans la nuit.

Retard d’un monde pressé
Facile dans le jour sombre.

Sans arrêt, bien sûr
Carreau lustré par l’ascendeur
Son sot seau bien tenu, j’espère
En panne d’inspiration.

Au centre-village global
Passe d’un éclair urbain.

Facile dans la nuit
Choix de fréquence.

Facile dans le jour
La période est courte, très courte, même.

Les micros sont dépassés
On garde les chums des nanas
Les plus fines, les plus minces, bien sûr
À faire du Hula-Hop avec un Life Savers.

Computation du privé
Information, disponibilisation
Création BITisation.

La lumière colorée.

Petit verre.

Privé

Au fond d’une serrure
Couloir sombre vers là
Vers là y heures, bien sûr
Nul n’y voit que pas.

Ça bouge, bouge-toi
Bouge de là, au fond de
Nature pure qui fait foi
Pulsation, telle l’onde.

Que s’échappe en douce heure
Quel temps merveilleux
Strobophonie, Martin-Pileur
Plongeant du plus profond des cieux.

N’y a-t-il qu’une vérité
Des choses cette serrure foi faisant
Mais que ne quelques prix vautrés
Se livre à que ne ça court, amant.

Arrêter le temps

Affairé à écrire, je ne me rendais pas compte que le temps passait. Et il passait vachement vite. Drôle de contraste, alors que quand on lit, le temps paraît s’arrêter.
Rien ne se perd, rien ne se crée, dit-on. Le temps qui paraît s’arrêter quand on lit, c’est l’auteur qui le fournit quand il écrit. Il ne faudrait pas se retrouver avec un manque de temps à la fin, et un surplus de temps serait chose inconcevable. Voilà aussi pourquoi les vieux livres semblent être plus longs à lire. Le temps qui leur est alloué est expiré, il faut qu’ils utilisent leur propre temps.

Je m’emploie à écrire, à vous permettre d’arrêter le temps. Cela semble si romantique, au fond. Un temps qui nous semble si banal quand on n’a rien à faire, si précieux quand on est occupé, temps doux, temps fou, d’une importance incomparable ou inavouée, à tous les âges de la vie. Un temps qui s’arrête quand on aime, quand on dort, quand on reçoit un coup, quand on meurt…et quand on lit.

Je vais parfois à la bibliothèque et je tombe sur des livres sur lesquels un auteur a passé dix ans de sa vie… Dix ans, c’est beaucoup de temps. Ça fait bien des secondes à distribuer aux fiers lecteurs, amis incontestés des mots.
Quel beau métier, tout de même. S’employer à créer les moyens d’arrêter le temps… temporairement, si j’ose m’exprimer ainsi !

J’entends le tic-tac de mon horloge numérique.

Le vent du large

Encore demain aura-t-il été lu par le commun des mortels encore vivants. Mais ceux-ci seront-ils satisfaits des idées transmises par cet essai qui plane dans le vent du large? Il voit au loin cet oiseau qui plane, toujours dans le vent du large et qui, tout à coup, plonge pour remonter ensuite… Ça lui fait toujours penser à sa vie, des hauts puis des plongeons qui remontent, parfois plus haut, parfois plus bas, mais il sait bien que plus la vie est haute, plus le choc avec l’eau est difficile à supporter. Il sait aussi bien que nous de 1+1=2, mais il sait aussi que dans la vie ce n’est pas toujours vrai. En fait, dans la vie, 1+1 font 1 dans les beaux cas, mais il existe plein d’autres possibilités moins réjouissantes… Dommage, ils auraient pu s’entendre.

Il revient à son observation du large, avec le soleil qui se couche… Celui-ci, il sait bien qu’il reviendra demain, mais si on prend la journée séparément des autres, il en voit toujours le parallèle avec la vie. Le matin, le soir, la naissance et la mort, les deux moments où le soleil fait éclater sa beauté, sa valeur… Le reste du temps, il est banal… Il est clair qu’il est pessimiste sur ce qu’aura donné sa vie. Mais il est optimiste quant à ce qu’il accomplira ou conquerra sur son déclin… C’est paradoxal.

A-t-il raison de voir sa vie comme le soleil? D’ailleurs, le soleil n’est-il vraiment intéressant que sur son lever et son coucher? Il devrait faire bronzer sa vie… Qu’aura-t-il accompli lorsque son essai aura été lu? Il ne le sait pas, mais pourtant il sait que ce qu’il aura accompli dans le coeur et l’esprit de ses égaux et de son ego ne dépendra que de ses actions passées et de ses pensées d’action…

Quand l’oiseau du large plonge, il remonte toujours, souvent avec quelque chose dans le bec. Il y voit que ses expériences ratées qui l’auront fait plonger lui auront, bien des fois, apporté quelque chose pour nourrir son esprit et son âme.

L’oiseau plonge. Des remous. L’oiseau ne remonte pas. Une tache plus foncée s’étend sur l’océan qu’une noire nageoire parcourt. L’oiseau s’est soumis à la première loi de la nature.

Sur la plage, Il est étendu. Le soleil se couche à l’horizon. Le cœur et l’esprit du commun des mortels encore vivants ont beaucoup appris de cet essai dans le vent du large.

Dans le ciel, les étoiles brillent. Dans le ciel, une lune ronde se lève.

Il était un petit navire

Navire duquel s’en furent les rats qui sentaient les présages de la mort prochaine. Il est certain que ceux-ci étaient parfaitement lucides et soupçonnaient le sort qui les attendait s’ils n’accomplissaient pas la course prévisible vers la lumière. Ils n’auraient ja-ja-jamais navigué, sinon. Ils ont choisi de mourir noyés au lieu de subir les affres de l’horreur qui les attendaient sur ce bateau qu’on leur avait monté. Ils étaient naïfs tout de même, croire que toute cette mascarade était réelle. Pauvres petits rats, petits moutons noirs de quelques pouces qui se promènent en troupeau en suivant le guide. Suivez le guide, qu’y disaient, vous verrez du pays.

Ah oui, du pays ils en ont vu. En tout cas, ils en auraient vu s’ils avaient daigné jeter un œil hors de la cale au cours du voyage avant cet instant fatidique, au lieu de se goinfrer honteusement dans l’orgie la plus totale, le chaos forniquant avec le néant, mais pas le pays qu’ils auraient voulu voir quarante ans plus tôt.

Rats noirs ou blanc, apparence trompeuse, au fond ils sont tous aussi moutons que les autres. Il suffit qu’un se lève et coure vers de nouveaux détritus pour que la foule le suive et bientôt il n’y a plus rien. Goélands. Et maintenant il y a encore plus pu rien qu’à cet instant, car même ces rats ont disparu dans les eaux tumultueuses de l’océan, enchaînés par une peur indescriptible d’un châtiment imminent. Châtiment tout aussi fictif que le bateau sur lequel ils vivaient la débauche. Aussi fictif que leur débauche elle même.

C’est bête les illusions que l’on peut créer avec un réalisme si saisissant. C’est bête ma tête m’fait mal au cœur ¹. Ils ont choisi le repos, mourir pour apprendre à vivre, mais ils n’ont pas pensé que laisser vivre, c’est mourir quand il le faut ². Ils ont laissé vivre l’illusion en se sacrifiant à cause d’une illusion de danger. Le fallait-il ? Gang d’épais. Tandis que les instigateurs de l’illusion de fendaient la tronche, pliés en quatre en voyant sauter à l’eau ces petites bêtes apeurées pour rien. Rien criant la vérité trompeuse, un vrai mensonge bien fignolé, sans apparence d’erreur. Il y avait pourtant des défauts dans ces illusions, des défauts bien évidents pourtant, mais ces ratbéciles n’ont rien décelé ou n’ont pas compris en les voyant, tellement ils étaient subjugués par l’espèce de bonheur artificiel dans lequel ils étaient vautrés. Le stupre et la fornication, pourquoi pas ?

Il ne suffisait pourtant qu’un seul s’en rende compte et l’armée, ces rats dont la colère aurait grimpé en flèche, n’aurait fait qu’une bouchée de ces illusionnistes pas tout à fait parfaits. Mais ils n’ont rien vu et se sont laissés entraîner dans ce joli bateau où flotte l’arbre à sucre. L’emblème bleu, homologue amaryllis, ne fera plus la fierté de ces petits moutons rateux noyés dans l’océan gris de rejets de boue en glaise.

¹ Harmonium – Chanson noire (le bien le mal)
² Idem – Le corridor